• la canalisation qui va de Gardanne à Cassis, ici dans la foret de GréasquePierre Aplincourt est un des administrateurs du Parc National des Calanques. Avec d'autres il a voté contre l'autorisation de la poursuite des rejets de l'usine d'alumine de Gardanne dans les conditions proposées par l'exploitant. A l'heure ou une nouvelle enquête publique est en cours, il est intéressant de lire son avis à ce sujet,  même si on n'est pas obligé d’être d'accord à 100% avec lui . M. Aplincourt nous livre ici un point de vue assez mesuré et critique par ailleurs certaines formes d'opposition trop systématiques.    Merci à lui de nous avoir autorisé de publier son texte .

     

     

     

    Mes avis et commentaires sur le rejet de l’usine d’alumine de Gardanne dans la baie de Cassis.

    Ex rejet des boues rouges

    Pierre Aplincourt administrateur du parc national des Calanques

    Pendant plus de 70 ans cette usine Pechiney, bénéficiant d’une complaisance coupable de l’Etat, a déversé dans la méditerranée au large de Cassis à 300m de profondeur et en tête d’une fosse de 2000m ses effluents constitués des boues rouges résidus de la bauxite, mais aussi des effluents liquides provenant des lavages chargés en soude utilisée pour l’extraction de l’alumine.

    Ces rejets toxiques très chargés en matière en suspension (plusieurs centaines de tonnes par jour) provenant de la bauxite contiennent de l’oxyde de fer mais aussi des métaux lourds toxiques et une faible radioactivité que l’on trouve naturellement dans la bauxite et dans certain sols.

    Cette pollution minérale historique bien que piégée en grande partie dans la fosse de Cassidaigne stérilise une zone importante des fonds dans l’environnement du rejet. Elle provoque une pollution par relargage mais aussi, comme les pécheurs le constatent, remonte en surface à la suite de coups de mistral (remontée des eaux froides.).

     Cette situation provoquera pendant de nombreuses années des impacts sur la faune et la flore du secteur.

     Impact qu’il est important de suivre et cela plus particulièrement dans les poissons consommés.

    Nous ne pouvons que déplorer ce comportement laxiste, durant plusieurs décennies, des gouvernements de droite comme de gauche vis-à-vis du groupe Pechiney ce qui a conduit sur ce site comme sur d’autres à laisser un environnement particulièrement pollué dont les générations futurs auront à pâtir.

    A ce stade, on ne peut que regretter, l’incapacité de la communauté scientifique, des protecteurs de la nature, des usagers de la mer, notamment des pêcheurs, à se faire entendre pour dénoncer une situation qui a duré pendant de trop nombreuses années.

    Aucune action ne pouvant être menée pour éliminer cette pollution minérale historique, je trouve personnellement qu’il serait normal de demander à Pechiney et aux groupes industriels qui ont poursuivi cette activité de contribuer aux investissements envisagés pour une renaturation des fonds marins du parc national des Calanques. Cette renaturation étént réalisée par implantation de récifs artificiels au-dessus des secteurs dégradés.

    Aujourd’hui, le contexte a profondément changé, depuis la mise en place de filtres presses par l’industriel sur le site de Gardanne .Ces filtres presses filtrent et déshydratent les boues rouges ce qui permet de les stocker à sec sur le site de Mange garri.

    Il est indéniable que le stockage à sec des boues rouges sur ce site doit être amélioré d’une part pour s’assurer que les eaux de pluie qui ruissellent sur le site ne pourront pas venir contaminer les milieux aquatiques environnants et d’autre part pour faire disparaitre les nuisances qui impactent les riverains de ce site.

    Cette situation nouvelle qui conduit à ne plus déverser les boues rouges en mer, se traduit par une nette réduction des pollutions rejetées dans la fosse de Cassidaigne : réduction de plus de 95% des matières en suspension et réduction d’environ 90% de la plupart des métaux lourds.

    Toutefois, les effluents liquides chargés en soude déversés en mer comportent notamment deux éléments toxiques (l’aluminium et l’arsenic) dont les concentrations sont supérieures aux normes de rejet.

    La concentration en soude qui conduit à un pH très élevé ne semble pas inquiéter la communauté scientifique notamment du fait du fort pouvoir tampon de la mer alors que sa neutralisation avant son rejet nécessiterait de très importantes quantités d’acide.

    Nous ne pouvons pas accepter un rejet en mer, de surcroit en zone cœur d’un parc national, dont la qualité n’est pas conforme aux normes.

    Avec 16 de mes collègues administrateurs du parc des Calanques nous avons voté contre la délibération qui proposait un délai de 20 ans pour permettre à l’industriel de se mettre aux normes.

    Depuis le vote de la délibération du parc, des campagnes médiatiques entretiennent le trouble en faisant de la surenchère et laissent supposer qu’il s’agit d’autoriser le rejet de boues rouges en baie de Cassis. Personnellement, je ne me retrouve pas dans ce type de campagne.

    Ces méthodes peuvent discréditer l’action militante et entrainer une dépréciation de l’activité des pêcheurs.

    Elles peuvent aussi porter atteinte à l’action que mène le parc et à l’image emblématique des Calanques et de la baie de Cassis.

    Les procédures en cours : le renouvellement de l’autorisation de rejet et l’enquête publique qui sera engagée prochainement sont bien en lien avec l’arrêt des rejets des boues rouges en baie de Cassis et non pas l’inverse.

    A la demande de la Ministre de l’environnement, trois études complémentaires ont été menées .Elles confirment la pertinence du traitement par filtration installé par l’industriel, et insiste sur la nécessité de renforcer les analyses et les contrôles sur le rejet, la qualité du milieu et sur les poissons.

    De plus l’étude réalisée par le BRGM conclue sur la nécessité de conduire une réflexion pour réduire le volume des effluents et sur la possibilité de procéder à un traitement complémentaire des effluents liquides pour les rendre conformes aux normes particulièrement sur les deux paramètres aluminium et arsenic .

    Ce traitement parait d’autant plus possible sur un plan technico –économique que cette même étude fait apparaitre qu’une partie importante de la pollution est concentrée dans de faibles volumes.

    Cette proposition, rejoint la position que j’ai exprimée au moment du vote de la délibération du parc.

    Nous nous retrouvons donc aujourd’hui dans cette situation qui oblige Altéo à réduire le plus rapidement possible et dans un délai maximum de deux ans la pollution du rejet pour le mettre aux normes afin de réduire au maximum son impact sur le milieu marin.

    Dès à présent, il faut savoir que nous serons nombreux à nos opposer, par tous les moyens d’action légaux en notre possession, à une autorisation permettant un rejet non conforme aux normes dans une zone cœur du parc national des Calanques.

    Certains, souhaitent, que l’on interdise tous rejets dans cette zone cœur du parc. Leur demande est légitime mais comment traduire cette demande :

    L’usine de Gardanne est située sur le bassin versant de l’étang de Berre, milieu fermé, fragile et déjà très perturbé. L’étude menée sur la recherche d’un autre lieu de rejet, fait la démonstration qu’un déversement des effluents de l’usine dans ces milieux particulièrement fragiles n’est pas à envisager.

    D’autres proposent que l’on supprime complétement le rejet de l’usine soit :

    1/ Par un traitement adéquat de l’effluent (recyclage, stockage /évaporation) .A ma connaissance aucune des études engagées n’a permis de conclure dans ce sens.

    2/ Par un arrêt de l’activité industrielle : La mise en œuvre de cette solution, aurait un coût socio-économique que l’on ne peut pas ignorer, mais conduirait( pour remplacer les productions de l’usine de Gardanne )à l’importation d’alumine et/ou de matériaux contenant de l’alumine pour lesquels les conditions de production pourraient ne pas présenter toutes les garanties en terme de normes sociales et environnementales qu’offrent la France et l’Europe.

    Comme nous pouvons le constater à la lecture de ces éléments, la situation est complexe et difficile.

    Pour ce qui me concerne et à titre personnel, je vais adresser cette note au Président de la commission d’enquête publique en espérant qu’elle puisse contribuer à éclairer le débat et sa conclusion.

    Avant de conclure, je voudrai revenir sur deux points :

    1/ Rappeler qu’au moment de la création du parc national, nous avons été un certain nombre à attirer l’attention sur la difficulté de créer un parc national avec une zone marine qui comporte les deux rejets polluants les plus importants de la façade continentale méditerranéenne Française

     2/Sur la nécessité de poursuivre et d’accélérer les efforts pour réduire les autres rejets très impactant de cette zone marine :

    - le rejet de la station d’épuration de la métropole marseillaise

    - les rejets de l’Huveaune et de son principal affluent le Jarret.

    Ces améliorations doivent concerner particulièrement les périodes pluvieuses qui se caractérisent par des apports très importants de pollutions de toutes sortes.

    Pierre Aplincourt     27/7/2105

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     


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